mardi 26 janvier 2010

Richard Skelton «Landings» (Type, 2009)


Il y a de ces albums qui arrivent au bon moment. La conjoncture des planètes fait en sorte qu'une trame sonore à notre vie apparaît quand on s'y attend le moins. D'ailleurs, l'effet de surprise semble indisociable de ces moments où, assis dans un café, dans le métro, en marchant dans la rue, tout entre en relation, tout s'illumine et tout fait désormais sens.

J'étais assis tranquille en train de prendre un café au coin de ma rue, fixant un coin d'immeuble par la fenêtre, me laissant imprégner par le temps gris, la chute silencieuse de la neige, que j'ai été frappé. Ça c'est fait assez brusquement. Dans cet intant je me suis oublié et prit conscience d'autre chose... mes préoccupations passagères se sont dissipées d'elle-mêmes, me laissant contempler un réalité empreinte d'une émotion qui n'est pas la mienne mais qui, étrangement, fait écho avec comment je me sens; seul, distant, étranger, triste... rempli des regrets liés aux actions mécaniques qui remplissent ma vie sentimentale de drames...

C'est à cet instant que la musique de Richard Skelton a pris tout son sens. Sa profondeur, sa mélancolie, sa tristesse d'une luminosité incroyable...«Landings» est un grand disque...définitivement un très grand disque, intimement personnel comme il s'en fait de moins en moins...Au départ, cet album était accompagné par un livre écrit par Skelton,comprenant des poèmes et des réflexions personelles, surtout issues, si j'ai bien compris mes sources, de la mort de sa femme en 2004. Mais l'édition avec le livre est déjà épuisé, reste juste le cd et le vinyle édité par Type.

Difficile de décrire la musique sur ce disque. Skelton joue de tous les instruments en juxtaposant de judicieuses nappes musicales, surtout des cordes, évoquant des bribes de mélodies lointaines, minimales ,froides, évoquant des compositeurs de musique classique contemporaine. Certaines pièces sont parfois accompagnées de field recordings, qui vont et viennent selon le momentum. L'oeuvre est abstraite, instrumentale, solonelle, méditative...La guitare est souvent jouée à l'archet, donnant l'impression d'un violon plaintif habité d'une richesse harmonique différente.

Il se produit des ruptures chez les individus, à même ce qui compose le tissus du champ de l'inconscient. Cette faille met à jour une béance qui, probablement, est déjà préexistante à cette rupture. Seulement, une fois révélée, quelque chose d'Autre peut s'y insérer, venant modifer le champ de la croyance, du Langage. Richard Skelton, en s'exprimant dans sa musique, a fait preuve de beaucoup de sensibilité. L'écoute de son monde intérieur est des plus véritable et sincère. Ce faisant, le sacré a pu se manifester en toute liberté...

http://richardskelton.wordpress.com/

samedi 23 janvier 2010

Sexualité et création



Je me rappelle qu'à une certaine époque (bon, époque...disons l'été il y a deux ans environ), j'écrivais régulièrement les soir en rentrant de travailler. Vers 23h il y avait un genre d'émission de télé erotico-porn-soft qui jouait à chaque jour. J'aimais bien mettre les images, couper le son et faire jouer une trame sonore plus invitante à l'écriture. Je trouvais que ce contexte suscitait une énergie, ou intention, très particulière pour la création. Dans plusieurs traditions mystiques, on enseigne que l'énergie sexuelle est créatrice. Que pour parvenir à des états de conscience supérieurs, il faut arriver à dompter la pulsion sexuelle pour le guider vers le travail intérieur, plutôt qu'extérieur. Ils n'ont pas tort les mystiques, Freud et Lacan non plus en disant que l'inconscient était sexuel. Cet été là je me suis aperçu à quel point c'était lié et j'ai écrit selon moi de très bon textes. Bon, depuis je n'ai jamais répété l'expérience, mais je crois voir comment le désir sexuel est un désir créateur.

L'année dernière, je suis entré en contact avec le musicien, bassiste fan de Wu-Tang, CJ Boyd (site)via myspace. Celui-ci cherchait des dates à Montréal et je me suis proposé de l'aider. Seulement, il ne m'a pas pris au sérieux et à préférer s'arranger avec d'autres personnes et, si je ne m'abuse, je crois que le show a été annulé en bout de ligne (pas sûr, je ne me souviens pas pourquoi je n'y suis pas allé)...

J'aime beaucoup la musique de Cj Boyd. En fait, son projet CJ Boyd Sexxxtet est particulièrement fascinant. De un, la musique est superbe; un genre d'orchestre de chambre à cordes avec un minimum de percussions, des drones,des voix, réciation de mantra tibétain, des mélodies et des montées bien ficelées, bref leur disque «Les Fleurs du Mal» sorti sur Becta-Lactam Ring, est vraiment bon. La démarche est aussi super intéressante. Les membres du Sexxxtet jouent nus sur scène et mélangent sexualité et démarche artistique...On peut s'imaginer l'effet que ça fait. Je veux dire, déjà qu'improviser sur une scène c'est un peu se mettre à nu, mais si en plus il faut se dévêtir ça devient.... disons ... saisissant? Et je ne crois pas que ça s'apparente à un freak show, la musique est d'une douceur et d'une beauté incroyable. Musicalement, c'est bien fait et pas du tout trash, donc j'imagine mal que leur démarche ne soit que pure vulgarité et indécence.

Mon objectif pour cette année, parvenir à booker le CJ Boyd Sexxxtet

mercredi 20 janvier 2010

Le chemin le plus difficile


Comme mentionné précédemment, je suis en train de lire le livre «Chants Libres; le free jazz en France, 1960-1975». Bon, la réflexion m'est apparue un peu sommaire et c'est pas super intéressant. Cependant, ce que j'ai aimé le plus sont les entrevues à la fin de certains chapitres et les citations utilisées. D'ailleurs l'artiste mentionné dans ce livre qui m'a marqué le plus est sans contredit le saxophoniste Michel Portal. L'entrevue qu'il consacre à l'auteur est la plus viscérale du livre; témoignage d'un artiste marqué profondément par sa démarche et son époque.

C'est ce qui me motive et m'attire dans la musique; emprunter des chemins inexplorés, risquer ça vie, sa santé mentale dans une démarche artistique sans garantie de reconnaissance ni de succès...je crois qu'on peut qualifier cette démarche de psychotique...seulement, la psychose est marqué par l'absence de doute... mais ma démarche n'est pas exempte de doutes...

Mon intérêt marqué pour le free jazz est survenu dans mon parcours hip-hop. Mes aspirations spirituelles, mon attrait pour la mystique, ont trouvé une communauté forte dans le free jazz des américain des années 70, sentiment d'appartenance que le hip-hop ne me procurait plus...Récemment, la psychanalyse m'a permis de comprendre un peu plus les pulsions à la base de ma démarche. L'interprétation de l'inconscient par le psychanalyste Jacques Lacan, s'est avérée une clé de recherche inspirante. En voyant l'inconscient comme un langage, on peut articuler la démarche de free jazz comme une recherche pour approfondir ce langage, la musique comme métaphore de l'inconscient. Ce n'est pas anodin que plusieurs jazzmen ont une vision de la vie teintée de mysticisme, Ayler, Coltrane, Silva, Art Ensemble de Chicago...tous ont tenté de créer une certaine rupture avec le langage du jazz et la spiritualité est venue compenser cette faille...D'ailleurs qu'Ornette Coleman sorte un album intitulé «Free jazz» est particulier. Est-ce un titre ? une injonction? En libérant le jazz, Coleman libère aussi l'inconscient, son potentiel créateur et ouvre la porte grande au transfert...D'ailleurs dans une récente entrevue dans le Wire, il mentionne s'intéresser plus on son de l'individu qu'à sa capacité de jouer. Il dit que chaque individu possède un son qui lui est propre et c'est ce son qui l'intéresse chez les musiciens avec qui il collabore.

Trouver son propre langage est une démarche tellement plus difficile que ce que les gens peuvent imaginer...difficile car elle mène souvent à l'ostracisation. Faire son propre chemin...c'est souvent ce que j'imagine être la fonction de l'art, mais trop n'ont aucune espèce d'idée de ce qu'ils font...

Quelques citations du livre m'ont frappé, en voici quelques-unes:

«Il ne faut pas refuser de faire le pas et cesser de s'abriter dans la musique des autres même quand elle rend heureux. Il doit bien exister quelquepart une ou des formes musicales à trouver, qui permettraient à chaque musicien d'être libre, et s'il est réellement musicien, de faire sa musique- dans une participation totale...» (Michel Portal)
«Quand je joue free (...), je ne triche pas , je suis moi-même, je suis chez moi.» (Michel portal)

Jean-Louis Chautemps, jazzmen français, a aussi une réflexion intéressantes : «Je vois la musique comme une exploration de l'inconscient, une sorte de psychanalyse. Il faut couler toujours plus loin dans l'épaisseur du rêve. On doit jouer, en fait, dans une sorte d'état second, si tout se passe bien, entre le rêve et la réalité.»

Ce ne sont que quelques citations, mais je crois que ces réflexions ont été articulé de façon très semblable par beaucoup de musiciens qui ont cherché à tracer leur propre voie. D'ailleurs, je ne peux qu'acquiescer avec la citation de Chautemps, qui est selon moi très, très, vraie.

mardi 19 janvier 2010

The Harmonic series: a compilation of musical works in just intonation (Important, 2009)


Je ne m'y connais pas vraiment en théories musicales, j'aime jouer et écouter au feeling, ne pas appliquer de grille d'interprétation qui me permet d'évaluer le jeu, le genre, etc...

La première personne à m'avoir parlé du «just intonation» est mon ami Will Eizlini. On discutait musique et spiritualité (comme souvent) et il a fait mention de cette façon d'accorder les instruments selon une séquence décimale bien particulière et faisant référence aussi aux théories de Gurdjieff et du livre de Deleuze & Guattari «Mille Plateaux».

«Just intonation» c'est efectivement une façon d'accorder les instruments, en utilisant des fréquences de tons qui sont multiples d'un ton fondamental (J'explique bien? pas sûr...). Bref, c'est une technique musicale propre aux musiques non-occidentales et utilisée depuis plus de 5000 ans, soit avant la gamme telle qu'on la connaît. Le «just intonation» permet de créer des harmoniques et des overtones très intéressants entre les notes et le drone musicale dérive de cette façon de faire (parecqu'un drone...ben c'est un drone)

Je me perds dans mes explications car c'est nouveau pour moi. La petite recherche que je me suis tapé sur internet et les notes abondantes du livret ne m'ont pas suffit pour bien intégrer les données. Cependant, ça fait un bout que je voulais parler de ce disque et je m'y risque.

Important est le genre de label qui fait des efforts considérables pour mettre en marché de la bonne musique. Ils ne se limitent pas à un seul genre et cumulent les nouvelles sorties sur une base régulière. Chaque fois que je vois une nouveauté sur ce label j'y jette un oeil car c'est souvent bien intéressant. Cette récente sortie s'avère quant à elle superbe.

Il s'agit ici d'une compilation regroupant des artistes que je qualifierais de «minimal» travaillant avec le «just intonation» ou travaillant sur des bases de série harmonique (aussi un façon d'accorder, à vrai dire, le just intonation dérive de la série harmonique ...c'est plus clair?). Le plus gros nom sur cette compile est celui de Pauline Oliveros, qui livre une sublime pièce à l'accordéon, mais on retrouve des nom plus ou moins familiers tels ceux d'Ellen Fullman et R Keenan Lawler. Tous les artistes préesents offrent un morceau avec leur instrument de prédilection, on passe du resonator guitar (Lawler), au piano (sublime Michael Harrison) à des instruments inventés (Fullman). C'est une très belle compilation, apaisante, pour tous les amateurs de drones mélodiques...

Dans «Récits de Belzébuth à son petit-fils», Gurdjieff nous expose les idées fondatrice de son enseignement. Ceux qui ont un peu lu sur lui, savent que cet enseignement est tripartite et intègre les idées, la danse et la musique. Le chapitre intitulé «La loi d'Heptaparaparshinokh» est surement un des plus hermétiques de ce livre. il y expose ce qu'il nomme communément la loi de Sept, loi qui régit toutes manifestations universelles, rien de moins. La découverte de cette loi sur Terre est le fait de deux frères chinois Tchoûn-Kil-Tess et Tchoûn-Tro-Pel. Ceux-ci ont mis au point une machine leur permettant de décomposer le rayon lumineux en sept tons différents. Où ça devient intéressant, c'est quand le successeur des deux frères jumeaux, le non moins chinois King-Tou-Toz, crée une machine appelée lav-mertz-nokh, une sorte d'instrument à cordes permettant d'approfondir la compréhension de l'univers, instrument que l'auteur compare avec le piano. Il dit: «Si l'on accorde de la manière voulue les cordes de de ce piano et que l'on provoque les vibrations requises sur les cordes correspondantes, la fusion de vibrations qui en résulte coïncide presque exactement, même d'un point de vue mathématique, avec l'ensemble des substances provenant des sources cosmiques adéquates conformément à l'Heptaparaparshinokh sacré.» Ainsi, sur ce piano, les tons entiers et les demi-tons entrent en interaction les uns avec les autres et s'aident mutuellement à évoluer ou involuer. Un peu à la manière d'overtones ou des vibrations de cordes sympathiques...

Intéressant, non? surtout quand on constate que les drones ont la particuliarité de créer un effet bien spécifique, selon le ton, chez l'auditeur...À cet effet, le disque de G.I. Gurdjieff d'improvisations à l'harmonium (vous noterez cependant dans le lien fournit ici, qu'il n'y a aucun rapport avec le groupe québecois Harmonium...)est foutrement intéressant.

dimanche 17 janvier 2010

mea culpa


C'est la suggestion de mon accolyte ypl de faire un mea culpa compte tenu de ce que j'ai écrit sur la musique expérimentale française...je m'excuse. Je dois avouer mon ignorance dans cette branche musicale et c'est justement ce qui m'inquiète.

Depuis mes premiers post à ce sujet j'ai fait mes recherches et commandé plusieurs albums de musique expérimentale française des années 70. Depuis une semaine j'écoute de la musique hautement inspirée et inspirante, c'en est troublant.

Quel est ce curieux phénomène faisant qu'un amateur de musique expérimentale, d'expression francophone, se soit tenu à l'écart d'une scène riche mais ô combien méconnue? J'ai toujours prêché la recherche musicale, ne pas attendre que la musique vienne à nous mais plutôt aller vers elle, de cette façon les découvertes sont d'autant plus satisfaisantes...bien sûr, il y a une limite à la curiosité et il est nécessaire de bénéficier d'un apport extérieur; disquaires, magazines spécialisés, blogs, etc... Je croyais me débrouiller pas mal, mais je me suis aperçu de ma paresse, de la façon dont je suivais les chemins que j'avais déjà tracé et par le fait même ne plus être si ouvert à de nouvelles découvertes.

Un commentaire sur une entrée précédente m'a fait réaliser que la France était aussi une des «perdantes» de la deuxième guerre mondiale. En fait, elle serait surement une des perdantes véritable, une de celle qui ne s'en ait pas vraiment remis dû à l'illusion de la victoire...

Pourquoi la musique expérimentale française des années 70 est-elle demeurée marginale pour un amateur comme moi ? Une des réponses qui me vient (rapidement) est tirée d'un livre sur le free-jazz en France. J'ai feuilleté brièvement ce livre de Vincent Cotro intitulé «Chants Libres; le free jazz en France, 1960-1975», et dans les dernières pages l'auteur , en l'espace de 2-3 pages, se questionne sur l'existance d'un free jazz typiquement français. Bon, je crois que la réflexion n'est pas super poussée mais une chose a retenue mon attention lorsqu'il parle d'une sensibilité française. Outre l'empreinte de la musique contemporaine, l'atonalité, l'élargissement du potentiel sonore par l'utilisation de différents instruments et autres considérations techniques, il mentionne un propension à l'auto-dérision...

C'est ici où d'habitude je décroche. Je n'aime pas vraiment la musique humoristique et encore moins celle qui joue sur l'auto-dérision (voir me posts sur le hip-hop québecois...). c'est facile de remarquer que cette tendance est largement répandue en France (Lard Free...) et, dans le free-jazz, c'est quelque chose qui m'a tenu à l'écart. Moi, admirateur de la cérébralité, du spirituel, de l'intensité sérieuse...Pas que ces qualificatifs soient incompatibles avec l'humour, seulement que j'ai l'impression toute personnelle que c'est une dépréciation de la démarche afin de la rendre plus accessible...(ça me rapelle un groupe québecois..).

On m'a fortement suggéré l'achat d'un LP récemment, soit celui du français El-g intitulé «Tout ploie». El-g est un des accolytes de Ghedalia Tazartès dans le groupe Reines d'Angleterres, show que j'ai tout simplement détesté pas un manque cruel d'originalité et pour le rôle de second ordre de M. Tazartès. J'avais trouvé aussi que les deux musiciens l'accompagnant avaient de drôles d'attitudes (ou énergie) vraiment pas invitantes et contrastant avec celle de Tazartès. Et leur élucubrations sonores étaient d'un vide profond... Voilà que j'ai acheté le dit disque, quand même, je suis curieux. C'est pas vraiment mauvais;un mélange de folk/chanson psychédélique et de collages sonores intéressant mais malheureusement les paroles sont insignifiantes (...auto-dérision?) et rendent le tout...mmm disons ....un peu stupide. Sans non plus faire preuve de grande originalité (ou peut être s'inscrit-il dans la lignée des grands chanteurs français? Écoutez Areski et Higelin; c'est plus drôle et mieux fait). Jeter un sequoia par la fenêtre, ce n'est pas drôle et énumérer une liste de choses absurdes qui seront également jetées par la fenêtre c'est un peu...mmm disons...un peu stupide. De plus, une entrevue du principal intéressé sur le site de Digitalis tombe aussi dans l'absurde et l'auto-dérison (mais le type fait preuve d'une grande culture musicale)...Je n'ai rien contre l'humour, c'est juste une drôle d'impression qu'il y a quelque chose qui cloche dans la démarche et surtout une certaine prétention...

mardi 12 janvier 2010

Taj-Mahal Travellers "Live in Stockholm 71"


On m'avait pourtant prévenu...Je crois que c'est Olivier au Atom Heart qui m'a dit en premier que c'était malade. Je ne l'ai pas cru sur le coup, j'ai écouté la chose d'une oreille distraite, jugé trop droney, pas assez de de mouvement, un disque double, seulement deux chansons...et le prix assez élevé venait sceller ma décision; non. Pas pour moi. Du moins, pas aujourd'hui.

C'est intéressant de voir comment les goûts changent (les miens en l'ocurrence). En l'espace de quelques mois, je peux être amené à aimer des choses qui ne m'avaient pas attirées pas auparavant et ce, surtout dans la musique. Au gré des découvertes, de mes lectures, je n'hésite pas à retourner voir des trucs que j'ai snobé et je réalise que mon appréciation a changé. Difficile cependant de déterminer les mouvements inconscients qui sous-tendent de tels changements. Est-ce une sorte d'auto-conditionnement ? Comme quand on s'efforce d'aimer une mode qui pourtant nous laisse froid? Est-ce parceque ma musique change et avec elle mes goûts? Je ne crois pas pouvoir parler d'une évolution cependant...et on peut débattre de ce qu'est l'évolution si vous voulez...

Parceque là c'est intense, le revirement radical...j'imagine que c'est mon approfondissement du japrock qui a initié cela , mais Taj-Mahal Travellers est devenu aujourd'hui mon groupe préféré. Effectivement il y a des drones, des longues pièces (un morceau par disque sur ce cd double) mais une écoute attentive et répétée en vaut tellement la peine. C'est d'une beauté incroyable et je parle des deux disques...je ne crois pas en préférer un plus qu'un autre. Taj-Mahal Travellers, comme le nom l'indique, c'est une invitation au voyage, au voyage intérieur, à travers les méandres de l'esprit observant le beau comme le laid, pour se rendre compte que ces qualificatifs n'ont pas leur place dans la psychée et qu'il existe des endroits encore inexplorés, que la musique nous permet parfois d'atteindre...

Quelle écoute...je peux difficilement résister à la tentation d'explorer leur discographie que j'ai regardé avec dédain...

La prochaine fois Olivier, je vais tenter de te faire plus confiance.

Merci à ypl pour le lien qui suit:

http://www.ubu.com/film/taj.html

Un film de 102 minutes sur Taj-Mahal Travellers en tournée. Le peu que j'en ai regardé est tout simplement sublime....

dimanche 10 janvier 2010

Kasumi Trio: «Oh Gimme you» (Beta-Lactam Ring)


Sorti en fin 2009 ce splendide disque risque bien de passer inapperçu. J'ai beaucoup d'estime pour le label Beta Lactam, ceux-ci savent prendre des risques calculés et sortir des albums vraiment particulier.

Kasumi Trio c'est la rencontre de trois musiciens japonais oeuvrant au sein de divers groupes: Michishita Shinsuke (guitare électrique , voix) de LSD March, Taksahi Ueno (guitare acoustique, voix) de Tenniscoats et Takahashi Ikuro (drums) de Fushitsusha et Nagisa Ni Te. Ces musiciens jouent aussi parfois avec le groupe Maher Shalal Hash Baz. LSD March c'est du folk psychédélique minimal, tout en douceur (sauf pour la collaboration avec Bardo Pond sur Archive) mais quand c'est couplé avec la pop psyché de Tenniscoats et le noise-rock de Fushitsusha, on rencontre un disque étrange mélangeant de façon superbe les trois genres, en y ajoutant une teinte naïve propre à Maher Shalal.

Quelques invités se sont joint à cette collaboration en prêtant voix et claviers, ce qui vient ajouter beaucoup de profondeur à l'ensemble. On retrouve des pièces instrumentales complètement improvisées et abstraites, mais aussi des perles folk/pop chantées en japonais d'une douceur incroyable. Un disque qui s'écoute bien, les moments d'improvisations emmenant des interludes qui, jointes à d'autres pièces semblables, auraient fait un autre disque encore plus intéressant.

jeudi 7 janvier 2010

France expérimentale p.t.3


Le monde virtuel est fascinant. Plus que je passe de temps sur les internets, plus que je suis stupéfait de ce qui s'y passe. C'est pas nécessairement mauvais, il se passe aussi de belles choses. Le fait de tenir un blog procure une certaine visibilité sur le web; les gens viennent voir, s'en vont, reviennent...certains marquent leur passage par un commentaire et invitent à découvrir leur blog. Pourquoi pas, quand des intérêts communs se rejoignent, autant les frotter ensemble pour voir si une étincelle ne va pas en sortir...

Si ce qui m'est arrivé avec le blog Les oreilles qui bourdonnent, où en fouillant un peu sur ses pages, j'ai découvert une entrée très intéressantes sur l'album d'un certain Jean Guérin intitulé «Tacet» (réédité par le label italien Elica). En bon acheteur compulsif que je suis, j'ai en l'espace d'une demie journée, trouvé un magasin en Italie qui tenait le dit cd et je n'ai pas pu m'empêcher...

Jean Guérin est une autre figure méconnue de la musique expérimentale française des années 70. Tous ceux qui ont écouté ce disque conviennent qu'il s'agit ici d'un disque très étrange,échappant au formatage grand public.

Tacet en latin, signifie se taire, c'est aussi une expression utilisée en musique pour marquer des silences. Je ne suis pas sûr du lien avec la musique contenue sur cet album, du lien avec le silence. Après de nombreuses écoutes, je retire qu'il y a définitivement une sensation «aquatique» à l'ensemble. Beaucoup de sons aquatiques, de un (des gouttes d'eau, marcher dans des flaques...), mais aussi le procédé d'enregistrement a quelquechose de distant, de flou. Je crois que c'est encore plus tangible dans les percussions, quasi omniprésentes sur ce disque. Des percussions liquides, distantes...très étrange. Le jeu de percussion me rappelle d'ailleurs un peu le travail d'Ikue Mori (percussioniste au même titre que Jean Guérin) et les manipulations électroniques aussi. Ce qui rend ce disque un peu plus intéressant que ceux de Mme Mori c'est l'apport des mélodies jouées au saxophone et à la trompette, les collages bruitistes et encore ce sentiment d'étrange étrangeté...très réussi.

J'ai longtemps pensé que sous l'eau, c'était le silence, on entendait rien. Mais une fille que j'ai fréquenté, adepte de plongée sous-marine m'a dit le contraire, qu'on entend beaucoup de choses et des choses qu'on a jamais entendue auparavant...

Ce disque est sorti sur le label français Futura en 1971, le même label qui a fait paraître le disque Fille qui mousse et le mythique Jac Berrocal «Musiq Musik». Celà dit, je crois que je viens de trouver un autre filon à explorer....

Pour revenir à ma réflexion sur l'expérimental français, serait-il possible qu'après la deuxième guerre mondiale, la France, qui était le phare des arts d'avant-garde, ai reléguée SES artistes expérimentaux à l'undergound? Un underground foisonnant mais ô combien méconnu? À suivre...

mercredi 6 janvier 2010

France expérimentale pt. 2


J'ai déjà parlé de la liste mythique de Nurse With Wound dans les pages de ce blog, avec un lien vers un blog où il était possible de downloader la plupart des albums se retrouvant sur cette liste. Comme je déteste downloader de la musique, il ne me reste qu'à trouver des copies physiques de certains des albums mentionnés dans cette liste. Profitant de ma lancée sur la musique expérimentale française, je tiens à souligner une autre oeuvre remarquable soit, l'album de Fille qui Mousse.

Définitivement un des noms de band le plus particulier que j'ai vu...Je veux dire, surement que Fille qui mousse soulève les mêmes images pour vous que pour moi, non? Le titre de l'album serait «Trixie Stapleton 291 se taire pour une femme trop belle». Difficile de dire si Trixie Stapleton a vraiment existé, ailleurs que dans l'imagination et les liners notes hermétiques d'Henri-Jean Enu, l'homme derrière le projet et également créateur d'une revue de contre-culture nommée le Parapluie. Mais encore, les notes disent que Trixie était une amie, membre de la troupe de danse Exploding Galaxy et qu'elle a été internée dans un hôpital psychiatrique...Que de considérations futiles....

Car ce qui nous intéresse est effectivement la musique. Et quelle musique. Ce disque est un espèce de collage sonore en neuf parties où se mêlent rock, drones, ambiances orientales, spoken word, musique concrète...Henri-Jean Enu, s'est entouré d'amis musiciens pour créer une oeuvre indémodable et très très particulière...Je ne sais pas trop à quoi ça pourrait être comparer...un moment c'est Can, l'autre John Cale...Un autre disque fascinant issus du début des années 70 de cette France d'après-guerre.

C'est drôle, en écrivant sur la musique je suis porté à y réfléchir aussi un peu. Je constate qu'actuellement je suis plus touché par des albums explorant diverses avenues musicales, qui ne se contentent pas d'une genre particulier et qui échappent au formatage . Et cette affinité suit une ligne parallèle avec ma musique...

mardi 5 janvier 2010

France expérimentale p.t.1


J'ai un peu parlé contre l'avant-garde française dans une entrée précédente et mon ami Olivier m'a vite rappelé à l'ordre. Car il y en a eu des choses intéressantes, pas beaucoup mais quand même il y en a eu. Le seul problème c'est qu'on doit dépoussiérer les genres, arpenter les blogs, se risquer dans le prog...Je consacre donc quelques entrées à certains albums français découvert récemment.

Je veux parler ici du groupe français Lard Free. Je suis un grand amateur de free-jazz et musique actuelle, je me renseigne, écoute, cherche, mais là ....Lard Free !? C'est sérieux? Réponse: évidemment que ce l'est et le disque que je me suis procuré est foutrement bon.

On asssiste sur ce disque à la naissance d'un groupe mêlant improvisation jazz et ryhtmique rock, se rapprochant un peu de Soft Machine mais plus dans l'esprit que dans la musique, car en comparaison de ce que je connais de Soft Machine, c'est beucoup plus expérimental. Enregistré à Paris en 1971 et 72, ce disque est un prédecesseur à leur premier album officiel, mais est paru plus tard. Mélange de free-jazz et de rock disais-je mais c'est pas encore tout à fait juste. Rien à voir avec Last Exit (vous connaissez?). C'est beaucoup moins lourd et pas «rock» pour les mêmes raisons. D'ailleurs je pense bien que ceci est leur disque le plus près du jazz.

De plus, les musiciens sur cet enregistrement me sont complètement inconnus...pourtant ils assurent pas mal. D'emblée le jeu de Dominique Tardif à l'orgue est hallucinant, Robert Wood au vibraphone vient ajouter une touche onirique à l'ensemble etle jeu de Philippe Bolliet au sax et à la clarinette, totalement inspiré, touchant par moment à l'esprit de Ayler mais aussi celui de Brotzmann dans les moments plus intenses. Les pièces passent du free au mélodique, de l'arrythmique au groove de façon magistrale. Vraiment une belle surprise qui me pousse à aller chercher les autres disques de ce groupe qualifié de prog...

Mais encore cet humour français dans la musique expérimentale...humour qui se justifie plutôt face à la musique. Lard Free....ahaha...et les noms de tounes: «La chevauchée des vaches qui rient» (....ahaha...) «Cochonailles» «Choconailles» «Noisy Son Sec»...et je passe le reste. Naturellement je n'ai pas trouvé que la musique sur ce disque se prêtait à la blague... mais bon, parfois quand c'est trop intense il faut se rabaisser un peu.

le myspace aussi est digne de mention

www.myspace.com/saindouxlibre

sans commentaires

vendredi 1 janvier 2010

Sun Araw «Heavy Deeds»


Voilà un disque qui s'est infiltré dans mon top de l'année un peu à la dernière minute. Je me devais donc d'en donner un peu plus d'informations.

D'emblée, dans le titre, on peut voir la référence à Sun Ra ce qui, au bout du compte, peut biaiser notre approche de ce sublime cd. Sun Araw est le fruit d'un seul homme (Cameron Stallones), ce qui s'avère surprenant surtout après plusieurs écoutes. Le point commun avec Sun Ra est la présence de claviers et le groove quasi omniprésent. C'est définitivement funky et dans le bon sens du terme. Je ne suis pas un amateur de funk à proprement parler mais ici c'est tout simplement déjanté, comme je l'adore. Les synthés et les lignes de basse sont super entraînants et la/les voix trempées dans le delay et le reverb. On dirait le groupe d'Eddie Gale (plus l'époque Ghetto Music) mais dans les années 80, découvrant la technologie associée à cette époque sous l'effet d'héroïne. La dernière pièce de l'album s'intitulant «Hey Mandala!» est un des meilleur morceau de musique que j'ai entendu récemment; la ligne mélodique de la trompette est magique, nous rappelant encore non seulement Eddie Gale, mais aussi Don Cherry à son plus inspiré.

Je ne suis pas familier avec ce nouveau genre de musique dit «Hypnagogic Pop» avec les James Ferraro, Gary War, Skaters et al. J'imagine que ce disque s'inscrit cependant dans ce courant, selon ce que j'en comprend. Une musique fortement influencée par le kitsch des années 80, une certaine nostalgie, l'utilisation abondante d'effets et un clin d'oeil au passé dans l'esthétisme des projets. J'étais pas super intéressé par le genre mais là quelquechose a changé....